
C’est avec une immense tristesse que nous avons appris le décès de Paul Benoit survenu le 18 décembre 2024, à l’âge de 88 ans. Paul a été un des membres fondateurs de notre association et a été notamment à l’initiative du programme H.27 ‘Les mines et la métallurgie dans la France de l’Est de l’Antiquité à l’Epoque Moderne’ débuté en 1982, et dont il a assuré la première coordination.
Au fil de sa carrière, comme maître de conférences puis comme professeur en histoire des techniques à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Paul a contribué de multiples manières aux avancées scientifiques relatives aux activités minières et métallurgiques anciennes.
Les apports épistémiques de ses travaux aux sciences historiques sont notables. Il a été un promoteur volontaire de l’examen croisé des sources. Historien de formation, il est devenu archéologue car il considérait que l’histoire des techniques ne pouvait se passer du recours aux sources matérielles. Il a très tôt favorisé la pratique de l’interdisciplinarité, qui est devenue aujourd’hui consubstantielle de notre discipline.
Faisant montre d’une curiosité sans cesse aiguisée, il s’est intéressé à de nombreuses thématiques de recherche. Il s’est intéressé à l’extraction minière, en fouillant les mines de fer de Minot et celles dépendant de l’abbaye de Fontenay en Bourgogne, ainsi que celles d’argent de Jacques Cœur à Pampailly dans les Monts du Lyonnais. Il a également étudié les installations de surface, affectées à la minéralurgie et à la métallurgie. Il a exploré les multiples usages des métaux, en étudiant aussi bien la fabrication des objets métalliques du quotidien, mais aussi celle d’outils spécialisés tels que les pointerolles du mineur. Il a accordé le même intérêt au métal qui bâtit (les renforts architecturaux) qu’au métal qui détruit (les bouches à feu). Au delà des métaux, ses centres d’intérêt l’ont porté vers des thématiques variées, englobant l’extraction de la pierre, les monastères cisterciens sous l’angle de l’économie, l’emploi de l’énergie hydraulique mais aussi l’histoire des mathématiques.
Paul a été un animateur infatigable de la recherche. Il a organisé ou co-organisé de très nombreux rassemblements scientifiques. Le colloque ‘Mines, carrières et métallurgie dans la France médiévale’ (Paris, 1980) a donné suite au colloque sur ‘les techniques minières de l’Antiquité au XVIIIe s.’ (Strasbourg, 1988) ainsi qu’à ceux de Lyon, Saint-Clément-les-Places, Saint-Brieuc… Il a consacré du temps à visiter des zones qui ont connu des recherches parmi les plus dynamiques dans les dernières décennies du XXe s. : France de l’est, Pyrénées, Alpes, Italie, entretenant des échanges soutenus avec ses collègues opérant dans ces secteurs, et qui ont fait partie des intervenants invités pour animer le séminaire du samedi de la rue Mahler.
Il a participé à de nombreux séminaires spécialisés sur les mines et le métal, en tant qu’organisateur et en tant qu’invité, les collègues de Toulouse avait grand plaisir à le recevoir et à l’écouter.
Dans sa jeune carrière, il avait été enseignant d’histoire et géographie à Castelsarrasin dans le Sud-ouest, où certains de ses anciens élèves en avaient gardé un très bon souvenir. C’était un enseignant passionné et intéressé au-delà de ses périodes historiques de prédilection.
Enfin, on se doit de saluer l’énergie qu’il a consacrée à sa mission d’enseignement en transmettant passion, rigueur et curiosité. Sans la pugnacité qu’il a su communiquer aux jeunes historiens et archéologues qu’il a formés, beaucoup de belles découvertes n’auraient jamais eu lieu. Au cours de sa carrière, il a assuré la formation de plusieurs dizaines d’étudiants, parmi lesquels se trouvent de nombreux acteurs de la recherche actuelle en ce domaine, au sein des universités, au CNRS, parmi les opérateurs de l’archéologie préventive, dans le monde associatif.
Au delà du scientifique qu’il a été, nous tenons également à saluer la mémoire de l’homme. Ceux qui ont partagé sa vie sur les chantiers de fouille archéologique gardent le souvenir ému de quelqu’un de franc, passionné, d’une grande force de caractère, engagé physiquement sur le terrain, et doté d’un humour inoxydable. Au delà de l’archéologie, il a été acteur d’une aventure humaine, de moments de partage dépassant le cadre du chantier. Paul était ouvert et aimait aussi partager ses points de vue, de grands moments de discussions sur la vie et la société, souvent à l’occasion, il faut bien le dire, de moments festifs bien arrosés.
Paul fut une personnalité marquante, tant scientifiquement qu’humainement. Il nous laisse un héritage considérable que nous aurons à coeur de perpétuer.
Glück auf!